Elles ont vécu la Libération d’Épinay-sur-Seine

Chaque année le premier dimanche du mois de septembre, Épinay-sur-Seine commémore la Libération de la Ville,  qui a eu lieu le 3 septembre 1944, par les forces alliées au terme de quatre années d’occupation allemande.
Jacqueline Grandjean et Jacqueline Lescauwier ont vécu enfant cette période de notre Histoire. Avec franchise, simplicité et humour, elles nous livrent, sous forme d’interview croisée, quelques-uns de leurs souvenirs et donnent ainsi pleinement corps à cet indispensable devoir de mémoire.

 

Comment était la vie sous l’Occupation ?

Jacqueline Lescauwier : La vie n’était pas tous les jours facile, il faut bien le dire. Nous avions des tickets de rationnement pour l’alimentation mais se ravitailler était parfois compliqué. Je me souviens que ma mère et ma grand-mère se levaient à 5 heures du matin pour aller faire la queue. À l’époque, Sannois et Saint-Gratien n’étaient encore que des villages, alors nous nous rendions à pied ou à vélo dans les fermes pour chercher à manger.

Jacqueline Grandjean : C’est vrai. Et je me souviens que mon père allait régulièrement chercher du lait à la ferme d’Épinay parce que nous n’avions plus rien à manger. Au bas de la rue des Acacias, il y avait un épicier qui travaillait au noir et nous donnait à manger de temps en temps. Après la bataille de France, lorsque l’exode a commencé, nous avons comme beaucoup de gens tenté de partir, mais la voiture n’a jamais démarré.

JL : Tous les matins vers 7 heures, nous avions le droit aux défilés de l’armée allemande qui apprenaient à leurs nouveaux soldats à marcher au pas. J’habitais alors rue Alfred de Musset, et au bout de la rue, il y avait un abri anti-aérien où nous nous rendions lorsqu’il y avait une alerte. Moi je regardais passer les avions et je me réjouissais lorsque c’étaient des avions américains !

Comment s’est passée la Libération ?

JG : Quelques temps avant la fin de la guerre, en 1944, mon père me racontait qu’il voyait les allemands défiler avenue de la République et qu’il les trouvait fatigués. Ils avaient demandé à mon père si Saint-Denis était encore loin, et je crois que mon père avait pris ça comme un signe !

JL : Tous les jours, on écoutait Radio Londres mais on ne comprenait pas tout ! Nous avions appris par le bouche-à-oreille que des chars allaient arriver sur l’avenue Gallieni et l’avenue Joffre en direction du Centre-ville. Je crois qu’à ce moment-là, nous avons compris que la guerre était terminée.

JG : Au moment de la Libération, je me souviens il y avait du pain de mie sur la table. J’étais très interrogative parce que c’était la première fois que j’en voyais, et mes parents m’avaient alors expliqué qu’il s’agissait d’un cadeau de soldats américains, donné depuis l’un de leurs chars. Je me souviens aussi d’être montée dans une jeep, j’avais des nattes avec des rubans bleu blanc rouges que maman m’avait fait…j’étais très contente. 

Un conseil aux jeunes pour l’avenir ?

JL : Ce que je retiens, c’est que la guerre nous a tous surpris. Certes on entendait parler de personnalités qui essayaient de mettre en garde, mais la presse était un peu muselée ! Après la Libération, les gens ont été abasourdis de découvrir les camps de concentration. Personne n’en avait entendu parler jusque-là, et personne ne pensait qu’une telle chose soit possible. Ce fut une prise de conscience terrible, et c’est la raison pour laquelle nous avons souhaité, au travers de ces anecdotes, faire comprendre cette histoire et la transmettre à celles et ceux qui viendront après nous.


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