Guerre de 1870-1871 : le poids des monuments, le choc des images ?
L’histoire du XXe siècle et les deux guerres mondiales semblent avoir effacé le dernier conflit impérial de 1870-1871 entre la France et la Prusse. Retour sur une guerre dont on célèbre aujourd’hui les 150 ans et dont on mesure peu l’émotion, et la reconstitution qu’elle suscita.
Tableau et propagande de guerre
Les fusils à baïonnettes sont en joue, les pantalons rouges s’activent… Paris est traquée, enfermée, assiégée par les Prussiens ! À l’extérieur de la capitale, la bataille fait rage ! La brigade Henrion est envoyée à Épinay pour déloger les Prussiens installés dans la ville.
Cliquetis des mousquets, brouillards des coups de feu, grouillements du combat, tout y est pour ménager les effets de glorification des soldats français. Raoul Arus peint Le combat d’Épinay en 1907. Un anachronisme de plus de 30 ans laisse place à l’invention et à la reconstitution. Ce qui est vrai, c’est la scène documentée notamment par la photographie : les maisons criblées de balles sont toujours visibles dans les années 1900, sur les cartes postales. Mais toute l’émotion de la scène est œuvre d’artiste, et commande du Ministère des Beaux-Arts, qui mit le tableau en dépôt à l’Hôtel de Ville d’Épinay en 1911.
Combat de propagande et propagande de combat
En ce début du XXe siècle, la IIIe république veut montrer des soldats glorieux qui se relèvent de la défaite : une France fière et conquérante, élevée par des professeurs « Hussards de la République ». Au square des Mobiles, un monument aux morts d’un nouvel ordre est érigé sur le lieu où 36 mobiles français ont été inhumés. Le sculpteur J.-P. Le Gastellois y représente une allégorie de la France forte, prête à guerroyer, l’épée et le drapeau à la main, inaugurée en 1908.
Quant au tableau de l’Hiver, peint en 1914 par Louis-Abel Truchet et conservé dans la Salle du Conseil Municipal, il met en scène le monument au mort du square des Mobiles paré d’un manteau blanc, vif rappel d’un passé écorné par la défaite. Ces œuvrent constituent à la fois des traces et des réinterprétations d’une histoire de la guerre franco-prussienne de 1870. Ils permirent le renforcement de l’identité française dans la narration de la IIIe république, même si c’est aussi sur le terreau de cet héroïsme qu’éclot la Première Guerre mondiale.