Issaba : la bosse du rap

Professeur de mathématiques au collège Jean Vigo situé dans le quartier d’Orgemont, Radouane Abbassi est aussi à l’aise avec les chiffres qu’avec les mots et les rimes. S’il fait le buzz avec ses raps sur les théorèmes de Pythagore et de Thalès, il n’a qu’un objectif : donner à ses élèves le goût des maths et de l’apprentissage.

Tout commence par un flow. Un flow spinassien bien sûr. Une instru de Busta flex, une figure du rap originaire du quartier d’Orgemont. « Si aujourd’hui, je prends le micro, c’est pas pour me la jouer balaise, c’est parce qu’après Pythagore, y’a le théorème de Thalès ». Le ton est donné, les bases (de la leçon) jetées : Radouane Abbassi est un matheux qui rappe. Prof de maths au collège Jean Vigo, il fait le buzz non seulement auprès de ses élèves mais de tous les collégiens français qui rêvent d’un cours de math en rap. Et c’est le moment de faire tomber un mythe : « non, je ne fais pas mes cours de math en rappant ! », assure l’enseignant de 32 ans.

La bosse des maths

« J’ai toujours eu des facilités en maths », explique Radouane Abassi. Son bac S en poche, il poursuit en licence Math puis en Master de Finances tout en s’adonnant à sa passion pour le rap qui le poursuit depuis l’adolescence. « Je rêvais de monter un studio pour rapper », confie-t-il. Pour mener à bien ce projet, il a besoin d’argent. Tout en poursuivant ses études, il cherche donc un job et se retrouve assistant pédagogique au collège Jean Vigo. Il participe alors à la vie du collège et cet environnement lui plait. Il change alors ses plans pour embrasser la carrière d’enseignant. Après Saint-Denis, Saint-Ouen et Ivry, c’est au collège Jean Vigo d’Épinay – où est née sa vocation – qu’il décroche son premier poste permanent de professeur de maths en septembre 2018.

Rap pédagogique

C’est devant une classe de 3e de Saint-Denis qu’il rappe pour la première fois devant des élèves. « Dans mes morceaux, je pars toujours d’un ego-trip, je parle de mon quotidien. C’était donc naturel pour moi de parler de maths en rappant », explique celui que l’on connaît aujourd’hui sous son nom d’artiste, Issaba. Quand il annonce son intention de résumer le théorème de Pythagore sur un flow, les élèves sont sceptiques, mais le résultat les convainc. « En sortant de classe, la rumeur s’est vite répandue, et au retour des vacances de Noël qui ont suivi, je me suis rendu compte que la nouvelle avait fait le tour du collège ». Ce coup d’éclat qui s’avère un coup de maître donne envie à Issaba de créer son premier clip hors du temps scolaire car il n’est pas question pour lui de négliger le programme. S’il en trouve le temps, il organisera des ateliers de rap pendant la pause méridienne. Il espère aussi organiser, avec des professeurs d’autres matières, des ateliers interdisciplinaires voire monter un projet, « pourquoi pas une comédie musicale ».

Les élèves n’attendent que cela, se réjouit-il : « ils sont vifs, pleins d’idées, à l’aise avec la caméra, ils ont de bonnes idées. On ne me croit pas quand je dis que j’ai mis seulement trois heures à monter mon dernier clip, mais c’est vrai et c’est grâce à eux ! » Malgré sa renommée grandissante, il n’est pas question pour Radouane Abbassi de vivre du rap. « Je veux que ça reste une passion et ne pas en dépendre pour vivre ». Son souhait le plus cher : donner à ses élève l’envie d’apprendre, de venir en cours avec plaisir car, assure-t-il, « le premier frein à la compréhension d’une matière, c’est l’ennui ».